Tistou les mains vides

Roman de Pierre Hubac (1951)


« Grand, sec, hâlé, on dirait de ces robustes sarments de vieille souche. Ses bras trop longs, ses oreilles trop larges, étalées trop amplement, son nez maigre, long et dur, un peu retombant et ses lèvres minces, comme avalées, lui composent une physionomie singulière.

Sa moustache grise descend en pointes inégales selon la manière berbère ; son front est sans ride mais tout craquelé et parcheminé, mal recuit comme une argile rustique mise au four à trop gros feu. Et ce front se couronne, loin en arrière, de touffes incolores fort mal plantées. Quant à ses mains, on dirait des racines compliquées, des ceps terreux avec des nodosités excessives, avec des bouts de corne ou des éclats de silex qui s’y trouvent encastrés.

 On dirait des tubercules exotiques ou des tenailles faites d’un très vieux métal inconnu tout rongé de rouille. La surprise, c’est de voir ces mains s’animer et vivre avec une invraisemblable précision.

Les yeux de Tistou, d’un bleu foncé, sont très profondément logés derrière une herse dure de sourcils épars. ».

Etrange bonhomme ce vieux Tistou. Et quelle singulière histoire que la sienne …

Celui que l’on a d’abord appelé tour à tour « Le Gavot » car il était bas alpin, « Lou Muou » car têtu comme un mulet, « Lou Rapiat » car avare, utilisa ses économies d’une vie afin d’acheter une ancienne bâtisse dominant la verdoyante vallée des Dardennes, à La Ripelle.

Cadet, son chien, fut son premier compagnon. Puis vint Amandine, la bonne présence amie, dans le calme des jours et dans la tiédeur des nuits.

Mais quelle singulière histoire,  l’histoire de Tistou …

Retour vers Sommaire "Balade au Château de La Ripelle"